lundi 7 janvier 2008

L'ÉRUPTION SYMPTOMATIQUE

La dernière prestation de Zingaro m’avait plutôt déçu. J’étais resté sur l’enchantement qu’avaient exercé les images de Loungta 4 ans auparavant, ses tableaux mirifiques. Et cette certitude qu’elles clôturaient une décennie de probité et d’excellence pour signifier son départ, la fin d’une histoire : ce cheval seul sous l’once de lumière, livré à lui-même, déchargé du cavalier et en mm temps empreint par lui, orphelin du maître et prêt à en remontrer. C’en était sûrement fini pour Bartabas de cette manière. Pour preuve, il évoquait son intention de revenir au cinéma. De l’élan pour de l’éloignement. Tout ça se tenait. De l’épure à l’ellipse, Eclipse.
Des charges entre le cours Jaurès et la rue de la République en Avignon pour ses débuts aux errances fascinantes de ces Lusitaniens si sereins de liberté, le voyage s’achevait. Le chef-d’œuvre était accompli. Il pouvait se séparer de ses bagages. L’Académie du Spectacle équestre qu’ON lui avait demandé (!) de monter à Versailles nous donnerait encore de ses nouvelles, des initiations d’alchimie au petit matin pour les + courageux. Il était mm revenu dans la Cité des Papes l’an dernier comme ON revient sur les lieux du dream, fantôme nostalgique qui renouait à ses premières amours. Il y présentait ce Battuta qui n’était + ça, le spectacle de trop, rien de nouveau, de l’esbroufe pour estivants, de l’animation de touristes, une diversion puisque la vraie création (?) résidait ds ce rendez-vs au Lever de Soleil et Dieu ou toi savez qu’il est très matinal en été. Chaque début de journée de son séjour durant le festival, il organisait le réveil des chevaux ou d’une conscience de spectateurs trop nonchalants et dilettantes à traîner la nuit après d’autres représentations jouées d’avance qui leur laissaient de quoi flâner et profiter du climat sous couvert culturel. Quelle + gde humilité que de partager cette aube pour rappeler où se situe l’authentique création, celle qu’ON ne voit + malgré nos yeux ? Les + futiles continuaient de payer une fortune le soir des places sur des coussins récupérés. L’arbitre est libre, le joueur aussi.

Alors la reprise au printemps dans le camp d’Aubervilliers n’était qu’un numéro bâclé, un tour de passe-passe réglé au petit bonheur la chance pour gogos qui n’y voyaient + rien, un bonto pour bobos. Bien fait ! Tout de ces événements autour du cheval qu’organisent dorénavant, au cours des férias, des municipalités qui ont flairé le filon pour des vacanciers amateurs de l’ambiance réputée pouvant ainsi dénigrer les corridas qui les inspirent, un pis-aller pour pisses-froid. Peu importe si les cavaliers sont + que débutants, pourvu que les parents attendris se régalent des maladresses de leur progéniture. Tant pis si les canassons se révèlent dangereux à la perspective de quitter pour une fois les sentiers tant rabâchés de randonnées ennuyeuses enquillées sempiternellement pour un prix combien + malhonnête que celui de Zingaro.

Bartabas devait sûrement sentir tt ça. Ce succès acquis d’avance devenait au moins l’équivalent des sorties du Cadre Noir ou d’une école espagnole qui malgré leurs performances impeccables n’ont pourtant rien à voir avec la complicité instaurée entre les intervenants humains et animaux, ces exceptions qui faisaient aussi d’oies des miracles loin du dressage, mais en pleine harmonie de l’instinct et de la beauté. Il restait cette dernière trace lors de la précédente Pentecôte à Nîmes, cette représentation annulée sous les averses de la dernière pour l’enchâsser définitivement parmi les mythes qu’ON évoquerait après sans jamais pouvoir rencontrer quelqu’un qui les aurait vus, la despidada de Loré, les adieux de Brel, les saluts de
La Dame aux Camélias.

Le temps passant, la roue tournant et le manège devenait un cirque auquel il avait pourtant tellement veiller à tj se démarquer, malgré les amalgames et les absents. L’ère en manquait,
Battuta tournait en rond, lui aussi donc. Il parait au plus pressé, relâchant la pression, rentrant dans le rang et ce n’était pas faute d’avoir essayé pour la peine. Le service minimum, un peu de sable sur les cashmeres encore et une acrobate parmi le public qui prit ma place comme par hasard et m’obligea à patienter sur l’escalier le temps qu’elle exécute son intervention. Ce n’était pas si désagréable, c’était inutile. Pirouettes, cacahuètes ! Pas la meilleure entrée pour découvrir le prodige, une drôle de sortie en tt cas et lui sur son âne ds les ultimes secondes, roi en tenue de zèbre, saluts sauvages, une hallu’, un feu de paille, pied de nez. Le clin deuil.

Ca ferait tj illusion, la preuve, guichets fermés et cet anoblissement étrange des écuries de Versailles qui lui demandaient de reprendre ses bâtiments délaissés. L’état le sollicitait de participer au renouveau d’un département engoncé qui ne trouve rien de mieux à défaut d’organiser des fêtes de la musique pour France 2 ou le concert de Cerrone. Il l’a fait pour rien. Il était convaincu de la nécessité de ce projet. Une institution qui ne formerait pas juste des cavaliers ou ne consisterait pas qu’à dresser des chevaux, une nouveauté dans le spectacle, une caresse, l’adresse. Pas de la cascade, des héritiers, des artistes à l’instar de ces musiciens qu’ON peut trouver partout ds le monde pour organiser un fabuleux concert, des virtuoses de l’échange avec la bête, des accompagnateurs étoiles pour les plus fantastiques ballets, rien du véto équarrisseur, tout du chaman.

Il partait là-dedans, confiant, enthousiaste, fier aussi de ces soirées d’été organisées dans les jardins et sur les bassins du château, des féeries orchestrées de preuve à l’appui que le divertissement n’est pas seulement affaire de remplissage et de longévité. + diffusion en direct à la télé, olé ! Usant de subventions pour subvenir comme il se doit et non comme il devait, puisqu’il n’avait rien demandé, puisqu’il a tj fait comme il voulait et qui le place parmi les rares à pouvoir la ramener et parmi les encore + infimes à ne pas le faire.

En dépit de ses difficultés financières ds le 93, bénévole ds les Yvelines. Sans rémunération, alors que la mairie de Seine Saint-Denis lui rognait déjà ses crédits en lui reprochant de manger à tous les râteliers, de fonctionner assez bien pour laisser ça à quel Vél’ib imploré ? Quel fonctionnaire pouvait estimer que le succès présent suffirait à se retirer de l’enjeu en continuant à récupérer les dividendes ? Quel abruti joue avec le feu quand ON offre au dernier vrai chef de troupe, des ponts d’or pour s’installer aux Etats-Unis, qu’un magnat Américain lui a proposé de construire un village entièrement dévolu à son travail auprès duquel le contrat de Céline Dion dans un
casing de Los Angeles ressemblerait à une loterie de fin d’année pour salle des fêtes ?

Il faut deux ans au bas mot pour rentabiliser un spectacle, sans compter sur rien d’autre que sa propre énergie et son inaltérable foi, sans tapiner à la télé, ni dégoiser dans les journaux. Et il ne s’agit pas de tisser qq sketches avec une ribambelle d’auteurs implantés dans tous les médias qui relaieront au + vite le nouveau stand up de dupes. Au moins deux années pleines pour retomber sur ses pattes et rester malgré ça endetté, pas pour ouvrir une boîte de production en se croyant au sommet et se la péter en produisant un traumatisé du 11 septembre qui n’arrive plus à baiser les petits épargnants, ni s’installer dans des hôtels particuliers du Marais ou de Saint-Germain des Près pour sauter de jolies journalistes (Si tant est qu’un des 2 termes ne soit pas trop exagéré.), mais plutôt espérer repasser une couche sur les roulottes d’origine et donner à manger aux êtres vivants, les hommes sont au même régime que les bestiaux. Un sacerdoce qui le ronge, une peau de chagrin qu’ON lui discute, les rats disputent le navire. C’est navrant.

Pour quelle Princesse de Courau le prennent-ils ? D’où sort cette ministre qui quitte ses responsabilités, comme un fait exprès, au château de Versailles et commence en critiquant l’édito publié ds le programme d’un centre dramatique qui doute du président et finit en dépouillant celui que son ministère a fait venir, maintenant qu’il s’y est engagé depuis 5 ans, l’obligeant à trouver sans doute sous le sabot d’un cheval ou sur la paille qui les menace, les moyens de compenser sa désertion ? Qui est-elle ? Qu’a-t-elle fait sinon échanger son siège avec un Aillagon qui a pris le sien (grand bien lui fasse) sous le vernis ? Puisqu’elle ne sera notée que sur les entrées de ces 15 musées devenus gratuits, que fait-elle de ses journées, sinon briquer la vitrine du musée de l’air au Bourget avec tous les beaux
zavions du fils Lagardère à vendre aux dictateurs de passage ? De son Palais Royal qui prend l’eau, ne voit-elle pas les colonnes de Buren s’effondrer aussi sur l’action plus que reconnue dans le monde entier et enviée partout de ce vrai rebelle de Clément Marty rebaptisé comme tous les Voyageurs, qui s’obstine depuis + de 20 ans à réaliser nos rêves, agrandir l’espace et nous balader autrement que d’une attraction de Disneyland aux pyramides auxquelles il n’a rien à envier et qu’il peut contempler sans Ray Ban, tant son propre ouvrage est tout aussi impressionnant et bien moins arrogants qu’elles (pyramides et binocles).

Des ressources qu’ils se chamaillent et le pur-sang s’emballe. Celui qui explique que :
« Le cheval est un être humain comme les autres », ce centaure fougueux rue dans les brancards que des ministres et autres secrétaires d’état atterrants, + en état de nuire que construire, semblent avancer devant ceux qui ont autre chose en tête que de pactiser à la Concorde ou de déjeuner avec un nouvel élu en rut sous démon de midi qu’il ne cherche plus à 14 heures (heure new yorkaise) sur sa Rolex de flambeur de tout bois dont ON fait certes les pipes, mais aussi les chèques en écho aux échecs promis de tels mépris.

Alors revoici Bartabas au mieux de sa forme. Me voici réconcilié avec lui. Dans sa sincérité et sa vérité, qui détruit un bureau de la Drac et autre ronds-de-cuir qui ont coûté si cher à mon frangin Lalanne et qui, non contents de le convoquer 3 heures avant le début de sa représentation, lui annoncent la réduction de son budget à venir. Bartabas casse, fracasse, remet les choses en place, les points sur les cris d’orfraies d’une culture éblouie dans son obscurantisme revendiqué, entre des
« émissions crétinisantes » pour préparer le cerveau et un karaoké d’acaNémie, par la moindre étincelle d’intelligence, l’importune lanterne trop proche dans cette caverne des vessies agitées à longueur de papiers des voiries publiques.

Ils préfèrent ainsi éteindre purement et simplement les feux de la rampe de l’Opéra Comique que Savary était parvenu à réactiver plutôt que lui laisser continuer ses succès. Magnifiques mustangs des
Misfits que les employés de la république ne veulent pas épargner autant que leurs congés pourtant déjà payés et prêts à être revendus, ils placeront le trublion en garde à vue, des fois qu’il aie pu assurer une fois de plus plus que son spectacle. Une vraie caillera de banlieue, un marginal de cette mascarade d’imposteurs, un nerf à vif quand Polnareff amnistie son exil fiscal en rendant les honneurs au 14 juillet, ts ces traîtres tellement ouverts qu’ils en ont perdu leurs tripes et que Bartabas leur balance à la figure. La ruade du sauvage, Zingaro, rescapé du Théâtre de l’Emporté de ses origines, qui ne lâche rien, débridé, puissant.

Qui a déjà vu un étalon se dresser ? Malgré tous les courtisans qui ne trouvent urgent qu’à refourguer un énième Feydau, contre ceux qui trouvent si intéressant de ne proposer que des reprises de chanteurs morts pour ne s’acquitter d’aucun effort jusques aux droits d’auteurs, contre les danseurs étiolés qui filent dans des jurys cathodiques tailler les prétentions de pauvres animateurs de centres de loisirs qu’ils font miroiter pour récupérer un peu de la lumière qui va plus vite que leur notoriété.

A la sortie du sagittaire donc, ce 21 décembre, il hennit, mi homme mi cheval, les renie, ces ennemis, ces dilatés de la dernière heure. Il saccage ses décors de carton-pâte à modeler sur l’opportunisme et l’intérêt personnel, plaque ses ors qu’ON lui a administré de redorer et qu’ON le défie maintenant d’entretenir comme s’il en était responsable, le prestataire coupable, le fournisseur débiteur. Elle n’a pas le trac, la Drac, elle n’a qu’à bien se tenir ! S lui qui doit prévoir l’augmentation de salaire de 120 % de notre petit homme, sans compter son émolument cumulé jusqu’à la fin de l’année dernière de son précédent emploi à l’Intérieur (le ministère, pas la coloscopie) ? S que M. Boloré ne pouvait pas revendre un de ses journaux gratuits qui infestent les entrailles parisiennes pour payer une Smartbox avec une
Escapade Gourmande ailleurs qu’au Fouquet’s cette fois-ci pour son meilleur représentant ? Au lieu de le laisser s’endetter davantage à prendre 2 entrées Adulte plein tarif dans un parc à thème, alors qu’il pouvait facilement passer pour le deuxième enfant gratuit, afin de pouvoir emballer un mannequin décroché au lieu de racketter l’écuyer là-bas ?

Bartabas est arrêté, mais le feu du terrain Zingaro brûle bien tj ds les gamelles de son génie. Il reprendra la route que ça ne m’étonnerait guère. Pour la peine, il baserait cette entourloupe qui le cocufie à son tour en utilisant son prestige et son talent sans le reconnaître, vache à laideur. Il les a envoyés en l’air dont ils ne manquent cruellement pas pour oser soutenir qu’ils s’étaient trompés dans l’énoncé du chiffre. Genre, puisque le marchandage ne passe pas à si peu, ON va vite rectifier avant la tempête. Trop tard. L’autre à imploser : lettre ouverte dans
Le Nouvel Observateur cette semaine, qui affiche les belles fesses de Simone de Beauvoir en couverture opportune. Je devrais peut-être en faire autant. Non pas montrer mon derrière, je laisse CA à Polnareff visiblement tellement mieux apprécié, mais demander s’ils ne se sont pas trompé aussi dans le montant qui ne nous est tj pas alloué depuis toutes ces années.

Ils se moquent. Ils l’ont pris pour un hongre, ma parole. Il ne faut pas prendre un animal à revers, gare au coup de pied. Il a bien fait. C’était super. Comme toujours. Exceptionnel et sensationnel. De ces sensations qui font tellement défaut de nos jours et de mes nuits. Du grand Zingaro, représentation unique et volcanique ! Gratuit et pourtant si cher payer. Sans moyen, ON peut être extrême. Son meilleur spectacle depuis longtemps.
MDR Cheval Où Ai-Je La Tête ?
©Lenz

Le théâtre doit toujours être un lieu de danger. Il doit rester un risque, pas le refuge de célébrités en mal de reconnaissance. La sciure dans les yeux, l’odeur des fauves à travers la cage et Belmondo qui surgit à la corbeille dans mon dos et me rugit à la nuque en me laissant prostré de surprise et d’admiration. Le dernier des artistes, le meilleur des maudits a sorti l’hiver de ses gonds et refroidit les cons. Bonne résolution pour la nouvelle année. Il ne lâche rien. Si mm lui, le réputé, la légende, agit ainsi, cela ne manifeste-t-il pas un réel problème bien plus profond, une gravité maligne, un malaise certain de la profession au moins ?

Dégage nous tout ça, Bartabas. Fais le ménage sans te ménager comme d’hab’, michto. Maestro ! Bravo ! Qu’ils aillent se faire voir. Tu nous as ouvert la voie, depuis longtemps. C’était en partie par toi que notre troupe existait. Par
La Fura dels Baus aussi, mais ils ne montent plus que des opéras glaciaux au Palais Garnier sans + affoler les foules dans les stades catalans qui pouvaient enfin faire autre chose que des saluts fascistes pendant les matches de foot. Par feu Archaos autant. Le Cirque du Soleil est devenu une franchise au service de Céline Dion. Tu es l’unique qui tienne. C toi qui gagnes, le + fort, la raison qui s'en sort.

Ils ne savent qu’indemniser des intermittents qui se bousculent sur
Astérix ou viennent t’empêcher de jouer ds cette carrière d’Avignon, comme ils sifflaient Chéreau dans les mêmes conditions, les bovos, parce que tu ne hurles pas avec ces loups qui préfèrent le collier pour compter leurs heures, toucher assez d’Assedic et maintenir leurs régimes spécieux pour pouvoir continuer à se prétendre artistes grâce à CA sans travailler. De la maison dite de Molière, sa fausse commune, au lever de rideau dès 19h30 des opéras nationaux dignes des procédures kafkaïennes de toutes les autres administrations auxquelles ils appartiennent, continue. Avec toi, à la traîne certes, mais n’est-ce pas à cela aussi qu’ON reconnaît les rois. Suerte ! Que 2008 te profite et que la suite soit royale.

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