samedi 21 juillet 2012

TEL ÉPRIS (noir) QUI CROYAIT PRENDRE

In ou Off, Avignon ou Arcueil, Toro ou Bélier, peu importe les prétextes ou les hasards qui portent, l'important est d'avoir assisté au prodige. Aimé. L’essentiel est de pouvoir y participer en le rapportant. Il est temps. La faena de Castano à Nîmes m’a échappé, mais Andromaque des Épis Noirs me permet le repêchage avec mention qu’autorise « (le théâtre, le théâtre) toujours recommencé. » La liesse en laisse et jusqu’au 28 juillet dans la Cité des Papes.
Il y a des retardataires, des amants prisonniers. Des revenants d’autre planète, Lericq est l’homme de toutes les générosités qui nous manquent, celles qui nous font défaut pareilles à celles qui nous défont dans le moindre appoint réclamé. La sienne se sacrifie pour soulager. Elle se risque en public pour éviter le pire, lâcher l’hameçon putassier, éviter la leçon. Il la joue pour ne pas renoncer. Elle étincelle à l’arrivée, sa cour l’a prouvé, royale aux barres. Chacun est allumé. Tout le monde est premier. La salle est blindée. 
Toutes ces années, chacun de notre côté, pour qu'une matinée, je sois cueilli. Combien de « Merci » lui dire de s'être obstiné ? Revenir en deuxième année avec cet époustouflant travail. Il s'astreint, ne lâche rien. Cent fois le métier, monter, créer. Empereur à tout crin, tel le rôle qu’il tient, le fer chaud. À bout de bras, de main de maître, il peut se permettre, foin de four et au moulin. Il peut jongler, interprète et prophète en son génie, la fête parfaite. Personne n’a perdu. 
Je lui dois à lui est ses Épis. Je lui dois plus que j’écris. Ils m’ont rassasié. Je me suis ressaisi. Je me sens recueilli où je refusais l’ennui. Affamé, je m'étais habitué à jeuner. Quitte à tiser pour compenser. Je vais certainement continuer, faut plus rêver, mais ce bout de bien m’a requinqué. J'en ai même cru pouvoir réveiller un projet endormi. 
Pourtant et mal an, j'avais vu les affiches de son Andromaque depuis longue. Ici où las, je les avais aperçues, il avait perdu d'avance : qu’il s’agisse d’une nouvelle création qui me tape toujours sur le système à ne sentir que la pompe à subventions et me dégoute d'avance dans ma propre obsession de création originale ; que ce soit une parodie pour faire passer la pilule d'une austérité qui rameute les scolaires pour se prétendre du spectacle en achetant des cachets Assedic et ceux chimiques d’une Sécurité bancale, c'était mal barré. Sauf sans compter sur l'insolence du hasard. Peu importe les prétextes ou les hasards qui portent x2. Il y a aussi ces productions qui tournent depuis des années avec comme seul argument qu'elles enquillent les spectateurs, qu'elles battent des records de fréquentation autant que les couilles à n'être qu'un millionième et pas bien placé. 
Le théâtre est vivant et le spectacle doit être puissant. Les Épis déracinent et des Ailes me poussent d’enthousiasme. Molière n'avait-il pas eu le droit de reprendre le Dom Juan de Molina ?  Mozart aurait-il dû se l'interdire ? Racine s'inspire de L’Iliade d’Homère. Qui y a à redire ? Son histoire avait déjà été traitée par Euripide, cette dernière adaptée plus tard par Sénèque. Racine cite L’Énéide de Virgile comme référence. Lericq rend hommage et se met à l'ouvrage. L’en priver aurait été dommage au vu de l’intérêt que j’y pris.
Il en faut de la passion et de l’ingénuité pour s'y coltiner. Sans compter l'énergie, puisqu'il retape le soir même dans un nouveau monologue autour de Nerval. +l'intelligence et l'humilité pour représenter et pas seulement rendre digeste. Il ne moque pas ce qui l'a fasciné à l’origine dans cette tragédie qui peut rebuter, peu importe les prétextes ou les hasards qui portent x3. Il a l'esprit. Il a le talent aussi. Tellement. Vraiment. Comment autrement encore me duper ? M’en mettre plein les yeux, les écarquiller et les tympans, m’envouter sur ses intonations et sa gestuelle ? Patienter en attendant ses interventions, comprendre que le plaisir continue quand il a disparu car tout est à son empreinte. Il y va par tant de chemins qui mènent au sommet en somme. 
Du cirque, le chapiteau si haut et la barre au cap Espérance. La parade au réflexe, le geste a la parole, Lericq dans la foulée qu’il a grande s’est foulé, pas à la suite plutôt celle des hôtels, dites, des idées qu’il fait fructifier de trouvailles en poésie. Il invente la fantaisie promise. L’éventail est si bluffant. Le principe et le modèle, il recèle. Manigance et agence. Manœuvre et invite, il évite l’écueil et nous conduit en vacances, aux heures grasses et à l’enfance. Sans tant de moyens, surtout son histoire et son succès. Qu'il soit flagrant aujourd'hui, que vous vous y précipitiez, par pitié pour que vous ne soyez jamais usé comme je l'ai été. Ne trainez pas, ni les pieds ni à lire ce plaidoyer. Tant pis s'il présente ÇA à midi : écourtez les conneries, le rosé et l’insomnie. Comme les corridas du matin à Nîmes, je vous dis, celle qui incite à la grâce, ce taureau là m'a pris les oreilles et je lui aurais bien laissé davantage si l'une de ses comédiennes avaient voulu s'y enfiler. 
Donc Lericq et cette troupe qui l'accompagne, son équipage, parce qu'il ne faut pas relâcher. Avignon ne le permet pas. Il ne doit pas. Savoir s'entourer est une qualité. Il faut enchanter. Tous musiciens, tous formidables. Chanteurs à leur heure. Un bonheur de fraîcheur. À bout de bras pour embrasser. Lericq et compagnie sont une magie. Sa musique à lui, leur harmonie ravit, youpi ! Et celle-ci déborde, aborde, elle embarque. Tsun_ami. Belle croisière. Quelle merveille m’émerveille. Mémère autant… 
En partition originale, pas de la bande con, chansons à l'occasion, du direct pour la foi, de l'uppercut pour l'action. Il dit « Barock' » Il ponctue, elle participe à l'émotion puisque notre époque sent avant de comprendre, vend avant d’apprendre. Il souffle dedans et le mistral du moment n’a plus rien d’étonnant. Le son surprend. L’ambiance guide. Ils suspendent le vol du temps, s'immiscent et nous délient de nos applications, nous changeons de registre. Les Épis Noirs proposent d'autres pistes. Ils balisent autour des rêves. À priori tout sourit. Ils nous dépistent et traquent nos registres. Nous sommes si vieux, nous errerons mieux avec eux. Sûr. Peut-être que notre émotion les rendra heureux. Au moins vos €uros un peu. 
Une réussite est affaire de vision, d'autre proposition. Ainsi sont ces effets de scènes qui redisent le même moment sous un autre angle, son indice, la même réplique qui siffle dans nos Têtes en d’autres espaces différents : Pyrrhus à gauche et Oreste à droite puis immédiatement, mouvement, cassure, le théâtre est de la surprise, Oreste ici et Pyrrhus en face ou encore l'inverse. Hermione. Ce petit amusement qui reviendra plusieurs fois avec les unes et les autres, sauf à la fin, fin. Il n’est plus l’heure de rire. La mort avait prévenu. Qui l’avait retenu n’y croyant plus ? La trouvant presque jolie sans voir que c’est toujours lui qui la personnifie jusqu'à la bonifier, pardi. Le théâtre là n'en est plus. Il est devenu la règle du jeu et l'absence en est l’enjeu. Elle nous mord la queue, elle sonne hors et la litanie du croque-mort a confirmé que le plaisir touchait à sa fin qu’il aurait dû à son cul pour nous permettre d’en profiter encore. Hélas, sale sort, il arrive à bon port. Au comble de l’effort, la raison à tort nous sort dehors. D’accord : à nous de jouer. À la réalité. Bon gré, mal gré, chasser le trésor. Et le verre de l’amitié proposé n’est que pis aller, le retour sera lourd. Ou le bâton, c’est selon. 
Alors je ne trouvais pas les mots au moment du salut, pas davantage maintenant que je l'ai vu, mais dans les arènes où je me réfugie doré_navrant car trop de spectacles me tuent, ON crie « To-re-ro ! To-re-ro ! » quand cela a plu. ON scande et ON applaudit. ON exulte. Cette fois-ci, il n'y aura pas à rechigner, personne ne meurt. Au contraire tous revivent. Alors « Viva » ira ? J'ai laissé 4ine crié « Bravo » et moi je me fends de ce petit mot comme ON trouve parfois de l'eau dans 1 caveau, pour manifester, pétitionner à mon tour quitte à péter plus haut que mon cru au moins faire tourner, ma pierre à l'édifice et Lericq à l'artifice. Il y aura d'autre représentation, il y aurait d'autres propositions et crois-moi, toi, Maestro, j'irai les yeux fermés, parce que je sais que cet artiste me les rouvrira, en confiance, avec respect, et qui verra vivra, puisqu'il m'a remis un peu d’envie, du goût à ÇA. 
Voilà, c'était un samedi en Avignon. (Il appréciera.)

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